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L'entrée en Chine : le choc !

Nous entrons en Chine sans vraiment sortir du désert.

Le paysage de fond ne change pas, c'est l'usage qui en est fait qui change, radicalement. Ici, très peu d'espace libre : des villes champignons, des camps de yourtes pour touristes, des statues de dinosaures en métal brillant (mais alors plein!)... Et surtout des éoliennes. Des champs d'éoliennes à perte de vue, sur une centaine de kilomètres. Bref, on sent qu'ici c'est habité, très habité, et pourtant on est dans la région la moins peuplée...

Ça signifie aussi qu'on peut aller de ville en ville pour manger et qu'on n'a plus à transporter notre nourriture et surtout nos litres d'eau pour plusieurs jours ! Pour nous, la Chine est synonyme de retour de la diversité alimentaire. Mais elle est aussi celle de l'arrivée du piment tant attendu... Et des plats commandés au hasard sur une carte qui nous parle en chinois!

Dès la frontière, alors qu'on choisit ce qu'on met dans notre soupe, on ne sait pas trop ce qu'on va manger. "Boule de poulet? De poisson? Ha non, c'est goût crabe". A part un loupé, visuellement peu ragoûtant mais tout a fait mangeable, on s'en sort néanmoins très bien et on mange comme des ogres. Il n'y a pas que les menus qu'on ne sait pas lire. En fait on ne comprend rien : on ne sait ni lire, ni s'exprimer. Et ici, loin des (très) grandes villes, pas un anglophone à l'horizon. On s'en sort difficilement avec le mime (pas toujours transparent !), le point it (ce petit imagier qui nous sert enfin) et beaucoup de patience et d'imagination. On essaye aussi l'application de traduction de nos téléphones aux résultats très aléatoires: certains ne savent pas lire, d'autres éclatent de rire en lisant ce qui est écrit. Dans un magasin de téléphonie où nous cherchions une carte SIM, les 10 vendeurs du magasin se sont passé notre téléphone en rigolant bien...et nous sommes partis bredouille. On arrive à repérer un ou deux idéogrammes dont celui d'hôtel (facile, c'est soit "2 étages sous un toit" : 馆, soit "une petite madame avec les cheveux longs" : 店).

Entre le vent glacial des premiers jours et les spots pourris, on a en effet décidé de dormir au chaud. Mais c'est là qu'on se confronte au "monde merveilleux" de la Chine. Dans plusieurs hôtels, on nous refuse en nous disant "il n'y a pas de chambre ici" (sic). On nous a déjà expliqué que les occidentaux ne peuvent pas dormir dans tous les hôtels, seulement ceux qui sont 'accrédités', sauf si le propriétaire fait une exception, ce qui nous est arrivé, au risque d'être verbalisé. Et faire une dizaine d'hôtels avant de trouver une chambre dans une grosse ville, de nuit après 110km de vélo, ne laisse pas le meilleur souvenir.

Une fois qu'on a trouvé une chambre (plutôt grand confort et Kris peut enfin dormir les pieds DANS le lit!), on n'est pas au bout de nos peines : on découvre le Chinese Great Firewall (vous aurez compris le super jeu de mot...). D'autres voyageurs nous avaient prévenus et on pensait s'être préparés. Mais non. Nos mails sont inaccessibles (aucun service de Google n'est autorisé, nos autres boîtes mails nous demandent 3 controles de login dont un dans gmail...), nos banques paniquent, et si Amélie arrive a télécharger un VPN qui fonctionne (c'est un gros-mot technique pour dire qu'on contourne le contrôle internet chinois par un serveur étranger), le téléphone de Kris refuse carrément de se connecter en Chine et son facebook est "suspendu temporairement dans l'attente d'une pièce d'identité valable"...

Ce n'est pas plus simple avec nos cartes bleues : il nous faudra près d'une dizaine de distributeurs avant de pouvoir retirer des sous, malgre les logos adequats. Heureusement que des amis chinois nous avaient avance a Lille, sans qu'on comprenne bien pourquoi au depart, de quoi tenir les premiers jours.

La cerise sur le gâteau, c'est l'essence. Notre brûleur en a besoin pour cuisiner nos petits dejeuners, c'est vital! Et pourtant, impossible d'en acheter. Les pompistes paniquent en nous voyant arriver avec nos velos et c'est sans cesse la meme reponse : "no-no-no" accompagne d'un geste nerveux. On apprendra ensuite qu'il n'est possible d'acheter de l'essence qu'avec une voiture enregistrée en Chine... On a tout de même su contourner le problème : on arrive vite et pendant qu'ils sont sous le coup de la surprise, on remplit notre bidon. Ils n'ont plus qu'à nous laisser payer. Mais quelle énergie pour seulement un litre d'essence!

A ces tracas, s'ajoute notre arrivée dans une zone urbaine gigantesque, Zhangjiakou 张家口 (la future ville des Jeux Olympiques d'hiver 2022). Tout juste sortis du plateau mongol et d'une région désertique (y compris la partie chinoise près de la frontière), nous sommes vite aggressés par une population et une circulation très denses et des coups de klaxons intempestifs. On met du temps à s'y faire (s'y fera-t-on jamais?!) le conducteur chinois se sent oblige de prévenir chaque fois qu'il approche. On soupçonne meme un lien direct entre la pédale de frein et le klaxon. Notre seule arme : une boule quiès...

Sortir de cette ville immense (où on a dénombré au moins 20 tours en construction) nous a pris plus de 50 km et surtout pompé notre énergie (St Petersbourg nous en a pris 55km par exemple).

Heureusement, ayant compris qu'il fallait éviter les gros axes menant vers Pékin, on a tracé un itinéraire passant par une plus petite vallée parallèle. Et on a eu le nez creux (ou plutot un méga coup de bol!).

Dès la fin de la ville, on est gâté : on dort dans des champs de maïs en étages (au risque de mourir électrocutés par un câble rouillé selon le mime inquiet du paysan qui nous alerte...), dans un lit de rivière asséché, sur un ponton au-dessus de la rivière (qui elle deborde)...

Et surtout, nous serpentons dans un des paysage montagneux parmi les plus beaux que nous ayons vu. Les couleurs automnales des arbres sont grandioses, les oiseaux nous paraissent exotiques, on voit des montagnes au loin et des falaises de calcaire vierge qui bordent la route. Une torture pour nos esprits de grimpeurs!

Dans ces vallees moins frequentees, on traverse des villages moins ravages par le traffic routier. Nous prenons le temps de visiter 2 temples bouddhistes perches au-dessus de villages preserves. On nous accueuille pour dejeuner dans le premier temple ou l'on nous sert ces boules de pain pas cuit que nous decouvrons pour la premiere fois.

Les vallées se succèdent et les paysages rivalisent de beauté. On se rend compte que, sans le savoir, nous circulons sur une route touristique mais que nous avons la chance d'être hors saison et en semaine. Il fait néanmoins très beau et ces jours sont très agréables pour nous.

Arrivant dans une vallée qui grimpe beaucoup plus (nous avons eu la chance de suivre une rivière pendant longtemps, nous épargnant les cotes), nous devenons quasi hystériques en voyant ces magnifiques dalles de granit qui surplombent la route. Mais où est notre matos de grimpe bon sang!!!

Et là, au détour d'un lacet de la route, nous freinons net : 2 grimpeurs, Chase et Sarah, attendent une voiture après une journée de longue voie. Leur seule présence nous rassure : cette vallée est bien équipée. Deux jours que l'on se posait la question! Ils nous confirment qu'il y a plusieurs sites et une petite communauté de grimpeurs pékinois... Et nous invitent à les suivre pour passer la soirée avec le groupe au gite. Nous passons une super soiree autour d'un repas où les plats typiques sont servis sur un plateau tournant au centre de la table. Tout le monde picore, c'est tellement plus convivial que d'avoir chacun son plat. Nous rencontrons Chase et Loren, un couple d'Américains qui enseignent l'Anglais, Sarah, une Chinoise de Pékin parfaitement anglophone, Karel, un Belge sinophile qui parle 4 langues couramment, Joachim, un Néerlandais qui bosse à l'ambassade et vit à Pékin depuis 13 ans, Jeff, un autre Américain qui bosse dans les technologies, Nicolas, un Colombien...

Apres quelques bières et avant même de nous coucher nous savons que nous reviendrons le weekend prochain. Kris en oublie sa serviette de bain en gage de retour.

Nous passions par là pour aller visiter la Grande Muraille. Sur leurs conseils, nous changeons nos plans et irons la visiter à Jiankou 箭扣. Un tronçon non rénové et très peu fréquenté nous y attend. Ils nous avaient prévenus : ça grimpe! La route d'acces fait 1450m de dénivelé positif sur 75km. Toujours dans des paysages magiques (et des falaises hyper accessibles et vierges...) nous roulons jusqu'a l'épuisement pour atterrir dans une petite auberge avec vue sur le "Great Wall". Vous apprendrez peut être ici qu'il n'y a pas qu'un seul et même mur continu en Chine (qui se verrait depuis la lune selon les plus folles rumeurs...) mais plusieurs sections de mur construites à différentes périodes plus ou moins solidement selon les dynasties. Ainsi, dès Zhangjiakou, nous avions vu un muret en pierres le long d'une arête montagneuse (pour être honnête la montagne est bien plus susceptible d'arrêter un envahisseur que le muret). Plus loin, c'est un gros mur en terre version torchis, pas très convainquant pour le "Great" Wall et, depuis plusieurs jours, apparaissaient regulierement des tourelles ou un bout de mur. Ici c'est beaucoup plus impressionnant, bien qu'on ne comprenne toujours pas la logique d'avoir construit cela là haut. La montagne fait déjà office d'obstacle naturel et quelle prouesse cela a dû être de faire tenir ce mur sur ces éperons rocheux...

Nous y passons une pleine journée de randonnée et de grimpouille pour aller de tourelle en tourelle sur un mur de 600 ans réinvesti par la végétation. Anecdote dans la catégorie "c'est la Chine" : des panneaux indiquent partout l'interdiction d'accès au site, pourtant nous avons payé un droit d'entrée dans la vallée, croisons des chemins de randonnée sur le mur ainsi qu'une dizaine de randonneurs qui les arpentent.

Le tourisme se développe dans le village et, malheureusement, les déchets sur le mur aussi. On se ruine les jambes en profitant de ce lieu incroyable et nous voilà bien courbaturés pour parcourir la dernière étape qui nous sépare de Pékin.

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